Droit à la déconnexion des Cadres

Fonctionnement du CSEPrévention des risques

Le monde du travail évolue constamment, et avec lui, les droits des salariés. L’un des droits les plus récents et les plus discutés est le « droit à la déconnexion ». Ce droit est plutôt facile à mettre en place pour les salariés suivant un régime horaire de durée du travail. Pour les salariés en forfait annuel en jours, comme la plupart des cadres, il est beaucoup plus difficile à faire respecter.

Un casse-tête pour les employeurs et salariés !

 

Le monde du travail évolue constamment, et avec lui, les droits des salariés. L’un des droits les plus récents et les plus discutés est le « droit à la déconnexion ». Ce droit est plutôt facile à mettre en place pour les salariés suivant un régime horaire de durée du travail. Pour les salariés en forfait annuel en jours, comme la plupart des cadres, il est beaucoup plus difficile à faire respecter.

Digital marketing. Businessman using modern interface payments oLe droit à la déconnexion protège la vie privée des salariés et prévient les risques de surcharge de travail ; il permet aux salariés de ne pas être en permanence sollicités par leur employeur, leur hiérarchie ou des collègues.

Dans un monde où les technologies de l’information et de la communication (TIC) effacent la frontière entre vie professionnelle et vie privée, cette protection est essentielle.

Que dit la Loi ?

La loi Travail du 8 août 2016 introduit le droit à la déconnexion dans le Code du travail (article L2242-8). Elle stipule que les entreprises doivent négocier avec leurs salariés sur les modalités de ce droit pour garantir le respect des temps de repos et de congé.

La jurisprudence a confirmé l’importance de ce droit. Ainsi, en 2018, la Cour de cassation a jugé qu’un employeur est tenu de veiller à ce que ses salariés ne dépassent pas une charge de travail raisonnable, garantissant ainsi leur droit à la déconnexion.

Le cas particulier des salariés en forfait jours

Les salariés en forfait jours ont une organisation du temps de travail spécifique, sans référence horaire précise. Cela peut les rendre particulièrement vulnérables à une sollicitation constante. Le droit à la déconnexion est donc essentiel pour ces salariés afin qu’ils puissent préserver l’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée.

Mais comment concilier autonomie dans l’organisation de l’emploi du temps et droit à la déconnexion ?

Si par essence, le respect de l’autonomie suppose de laisser aux salariés en forfait jours, une certaine liberté dans le choix de leur temps de connexion et de déconnexion, cette autonomie ne signifie pas liberté totale. Chaque salarié se doit de respecter le droit à la déconnexion de ses collègues, y compris de sa hiérarchie. En cas de dérive, l’employeur doit exercer son pouvoir disciplinaire à l’égard du salarié fautif.

Des sentiments qui évoluent avec le télétravail ?

Après une première étude sur cette thématique dès 2016, l’IFOP a réalisé une deuxième étude en 2017 qui a confirmé l’hyperconnexion des cadres. En effet, 78 % d’entre eux consultaient leurs communications professionnelles les week-ends et durant leurs vacances.

Si ce score est stable (+1 point par rapport à la vague de 2016), l’intensité de ces consultations est en hausse. 37% des personnes interrogées les consultaient en effet ‘souvent’, soit une progression de 6 points en un an. La possibilité d’un accès permanent et simplifié aux outils de communication professionnelle était déjà vécue de manière anxiogène et considérée comme un facteur de stress par une majorité de cadres (51%).

Les perspectives de faire redescendre ce niveau de pression n’étaient alors pas encourageantes car une majorité de cadres (52%) affirmait que leur entreprise ne s’était pas engagée dans l’application du droit à la déconnexion.

Mais la crise sanitaire est passée par là et a profondément changé les habitudes de travail des Français. Beekast a souhaité en savoir plus sur les tendances du travail hybride et l’état d’esprit des cadres aujourd’hui.

C’est dans ce contexte que cette société a lancé une étude en partenariat avec OpinionWay sur plus de 1000 cadres. Cette étude révèle que 74% des cadres qui télétravaillent au moins 3 jours par semaine sont satisfaits du mode de travail hybride. Or, ce télétravail implique un très fort niveau de connexion, notamment avec une moyenne de 8 heures de réunion par semaine, essentiellement sous forme de visioconférence…

L’étude APEC (Association pour l’Emploi des Cadres) de 2022 confirme cette satisfaction liée au télétravail : 62% des cadres jugent que la mise en place du télétravail a eu un impact positif sur leur santé psychologique. Néanmoins, 1 cadre sur 4 estime que sa santé mentale s’est dégradée ces 2 dernières années ; ils avouent avoir un sentiment de surcharge (55%), d’épuisement professionnel (54%) ou de stress intense (54%).

De nombreux cadres font état de difficultés à suivre une réunion à distance*. 68% déclarent qu’il leur arrive de temps en temps de détourner leur attention et 50% déclarent avoir régulièrement des difficultés à suivre une réunion à distance jusqu’à leur terme.

Une solution pourrait se trouver dans le recours à des outils collaboratifs. En effet, 63% des cadres estiment qu’ils leur arrivent régulièrement d’assister à des réunions de moins bonne qualité en raison d’un manque d’interactivité.

Savoir déconnecter s’apprend !

Savoir déconnecter ne s’improvise pas. Pour ce faire, l’employeur doit mettre en œuvre des formations et rédiger une charte de bonne utilisation des TIC afin d’arriver à un usage raisonnable des outils numériques.

Assurer un suivi de la charge de travail : une nécessité

Si les salariés en forfait jours jouissent d’une grande liberté dans l’organisation de leur travail, la charge de travail doit demeurer raisonnable. La jurisprudence se montre particulièrement exigeante sur le sujet.

« L’accord collectif qui met en place le forfait en jours doit instituer un dispositif de suivi effectif et régulier permettant à l’employeur de remédier en temps utile à une charge de travail éventuellement incompatible avec une durée raisonnable ».

Le constat actuel : un suivi défaillant…

Aujourd’hui, bien peu d’accords collectifs prévoient la mise en place d’outils d’évaluation de la charge de travail, la notion même de charge de travail étant difficile à mesurer par sa dimension subjective. Le ressenti de la charge de travail est une notion propre à chacun…

Aussi, la difficulté de mise en œuvre d’outils d’évaluation n’exonère pas pour autant l’employeur de sa responsabilité. Il doit donc déterminer pour chaque collaborateur la charge prescrite de travail (ce qui est demandé au salarié), et évaluer la charge réelle de travail (réalisée par le salarié) et la charge vécue (ressentie). 

Le contentieux du droit à la déconnexion

De plus en plus de salariés demandent en justice la remise en cause de leur contrat de forfait et formulent des demandes de paiement d’heures supplémentaires, brandissant une violation du droit à la déconnexion.

D’autres contentieux peuvent émerger, en cas de non-respect du droit à la déconnexion :

  • Le harcèlement moral et/ou le burn-out,
  • Un manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Le rôle du CSE dans le droit à la déconnexion

En tant que représentant des salariés, le CSE peut négocier un droit à la déconnexion. Il peut ainsi proposer des accords sur les modalités de déconnexion, comme des plages horaires sans emails ou des périodes sans sollicitations professionnelles.

Le droit à la déconnexion est une avancée majeure pour les salariés, en particulier ceux en forfait jours. Il permet de garantir un équilibre entre vie professionnelle et vie privée, essentiel pour le bien-être et la santé des travailleurs. Les salariés doivent connaître leurs droits et veiller à leur application. La mise en place d’un suivi de la charge de travail par l’employeur est indispensable pour que ce droit soit respecté.

 

Article rédigé par CEOLIS, l’expert-comptable du CSE – www.groupe-ceolis.fr

*étude Beekast 2022

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