On parle souvent de la semaine de 4 jours du point de vue de l’avantage pour les salariés de bénéficier d’une journée de plus pour ses occupations personnelles. Mais c’est concrètement du point de vue économique et financier que se situent les gains pour l’entreprise. Explications avec Alexandre Pichori, expert-comptable au sein du Cabinet AKP Conseils.
Habituellement, la semaine – de ou en – 4 jours peut être discutée au moment de la consultation obligatoire du CSE concernant la politique sociale de l’entreprise, les conditions de travail, et l’emploi. Expert-comptable spécialisé dans l’accompagnement des CSE, Alexandre Pichori conseille aux CSE d’intégrer également cette question dans le cadre de la consultation sur les orientations stratégiques de l’entreprise.
En effet, cela permet à l’expert-comptable de détailler l’ensemble des atouts économiques liés à cette nouvelle organisation du travail… et de fournir un argumentaire chiffré aux élus en ‘béton armé’ !
Les orientations stratégiques de l’entreprise : ne pas oublier les orientations stratégiques en matière RH
Dans le cadre de la consultation obligatoire sur les orientations stratégiques de l’entreprise, le CSE peut faire appel à son expert-comptable pour analyser la stratégie de l’entreprise, mais surtout son adéquation avec les moyens dont elle ou le groupe dispose. Dans ce cadre, l’ensemble des éléments qu’il réclame doivent lui être fournis par la direction.
À travers cette analyse, il pourra analyser les différentes options stratégiques retenues par la direction, mais surtout les challenger. Il mettra ainsi en avant les atouts de la semaine de 4 jours, mais surtout apporter une justification économique et financière à ce dispositif.
D’une part, l’entreprise réalisera des économies sur certains postes aujourd’hui non négligeables, par exemple la consommation d’électricité à l’instar de Microsoft Japan qui a constaté une baisse de 23 % de celle-ci. L’entreprise avait aussi alors annoncé avoir réduit son nombre d’impressions de près de 60 % !
D’autre part, en tenant compte des exemples d’entreprises ayant déjà mis en place la semaine de 4 jours, il pourra extrapoler les gains de productivité dont celle-ci bénéficiera.
Concrètement, il ne s’agit pas de ‘réclamer’ un avantage social classique comme une journée RTT de plus, mais plutôt de faire comprendre à la direction de l’entreprise que la mise en place de la semaine de 4 jours lui permet de changer de modèle économique et rendre son organisation plus efficiente…
Un plus pour les RH
Alors que le recrutement de personnel qualifié constitue une problématique récurrente des sociétés ambitieuses, la semaine de 4 jours apporte une réelle valeur ajoutée à l’entreprise dans la bataille qu’elle livre pour attirer à elle les meilleurs profils. Elle est vecteur d’accroissement de la motivation du personnel, et aujourd’hui vécue comme un avantage à part entière.
Dans les années à venir, la plupart des entreprises feront appel aux services de l’IA (Intelligence Artificielle) pour accroître leur rentabilité. Ce changement technologique pourrait d’ailleurs accompagner la mise en place de la semaine de 4 jours.
Comment faire ?
« Il ne s’agit pas d’imposer à la direction de l’entreprise quoi que ce soit sans qu’elle l’ait testé » explique Alexandre Pichori. « Pour mettre en place la semaine de 4 jours, il faut savoir répondre aux contraintes qu’impose la législation du travail et la convention collective. Une telle réorganisation ne s’improvise pas. Il faut la penser. Ensuite, un test doit être effectué de plusieurs mois afin que la direction, les managers et les salariés puissent mesurer les réels bénéfices de cette réorganisation. Ce test peut être réalisé auprès d’un service, ou d’une équipe dans un premier temps ».
La mise en place de la semaine de 4 jours nécessite la signature d’un accord d’entreprise. Cet accord peut être signé par les syndicats lorsqu’ils sont présents, avec le CSE lorsqu’il n’y a pas de syndicat ou encore par un vote des salariés qui doivent répondre favorablement au projet pour les deux tiers.
L’intervention de l’expert-comptable permettra d’ouvrir cette thématique de négociation, sur la base de simulations chiffrées. La particularité de l’intervention sur les orientations stratégiques repose sur la possibilité pour le CSE de réaliser des propositions alternatives, sur lesquelles, l’organe de direction (conseil d’administration, société mère…) aura l’obligation d’apporter une réponse. Cette intervention permet ainsi non seulement au CSE de réaliser des propositions chiffrées, mais également être assuré d’obtenir une réponse non pas du Président du CSE, mais de l’organe de direction de l’entreprise.