Le travail est un élément essentiel de la vie ; ses répercussions sur la santé sont nombreuses. Depuis 50 ans, l’ANACT – Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail – est présente aux côtés des entreprises et des salariés pour les aider à améliorer les conditions de travail.

 

L’ANACT est un établissement public administratif créé en 1973 régi par le code du travail. Installée à Lyon, elle est placée sous la tutelle du ministère en charge du Travail et administrée par l’Etat et les partenaires sociaux. Elle fête ses 50 ans ! A cette occasion l’agence a lancé une série de vidéos sur l’histoire des conditions de travail depuis sa création.

 

QVT et CSE - AnactL’ANACT a été créée dans le contexte des grèves massives de 1968. L’agence publique est intervenue au départ dans un environnement où les revendications concernant les cadences infernales et de salaires se multipliaient. À Lyon, les travailleurs immigrés firent grève contre la toxicité de leur travail et parallèlement.

« On intervient, on expérimente, on va sur le terrain pour que les acteurs résolvent eux-mêmes leurs problèmes. Nous développions alors une politique éditoriale soutenue, disposant d’une crédibilité scientifique. Notre mission était d’apporter des cadres » explique un ancien cadre de l’ANACT.

La régionalisation de l’agence commence tôt, dans les bassins industriels : Lorraine, Pas-de-Calais, etc. ; l’implantation régionale se dessine, ce sont les premières antennes locales de l’ARACT.

Puis, dans le patronat, une vision moderne du travail se développe ; Franck Ribout, PDG de Danone, apporte une critique du taylorisme. L’ANACT intervient dans la conception de l’imprimerie du Monde ; influence le projet initial et poursuit ses avancées pour l’imprimerie du Figaro. La méthode consiste à faire participer les différents acteurs de l’imprimerie à son organisation.

En 1982, les Lois Auroux apportent de nouveaux droits aux travailleurs, notamment le droit d’expression. La négociation collective est renforcée ; les salariés ont le droit d’identifier les problèmes qui n’apparaissent pas à la hiérarchie. L’idée est de mobiliser l’intelligence des personnes.

L’ANACT se doit alors de faire émerger des changements, des initiatives et transformer le monde du travail…

Prise en compte des TMS

L’ANACT fut l’un des tout premiers acteurs à avoir pris en compte les TMS : cervicalgies, tendinites… 57 TMS sont inscrites dans un tableau, qui représentent 88% des maladies professionnelles. Fin des années 80, l’ANACT pointe le rôle de l’organisation du travail dans ces affections.

La première demande en 1988, portée par l’ARACT Alsace, émane de chez Adidas, pour un poste d’encollage de la semelle. Les ouvrières avaient une inflammation du poignet. La DRH était confrontée à une absence de salariés à cause de douleurs sur le canal carpien. En Normandie, c’est dans une production de fromage. La bureautique et le tertiaire sont aussi atteints par cette épidémie…

Les années 88 90 sont marquées par un nouveau mode d’organisation du travail :  des méthodes japonaises où le travail est intensifié, les gestes répétitifs et la pression temporelle forte.

Les TMS constituent la première maladie professionnelle devant l’amiante. Ne prennent pas en compte les pax qui ne veulent pas aller vers la reconnaissance de leur maladie. La question de la reconnaissance relève en permanence d’un rapport de force entre ouvriers et patronat.

Deux regards distincts sont mis à jour. L’ANACT pense qu’il y a corrélation entre affection péri articulaires et travail ; L’INRS développe une approche biomécanique.

L’ANACT pose la question de l’organisation du travail. Toutes les disciplines peuvent coopérer.  « Nous maillions l’approche quantitative et l’approche qualitative ; cela confirmation l’importante proportion de personnes atteintes ». L’ANACT a alors créé un Club TMS, pour partager ce qui se faisait dans les entreprises pour combattre les TMS.

Afin de faire face, une des idées a été la diversification des tâches, la mise en place de temps de récupération.

 

Les 35 heures, pourquoi tant de controverses ?

QVT et CSE - AnactC’est Martine Aubry qui a lancé le temps plein de travail à 35h (au lieu de 39h). Si au départ, l’état n’entend imposer aucun modèle, en 1997, la baisse du temps de travail est annoncée. « On donnait aux gens différentes façons d’organiser leur temps de travail, selon les secteurs d’activité ».

Des aides de l’état à la création d’emploi venaient compenser les coûts. « Là où il a été possible de prendre 3 mois de plus, il est probable qu’on a réussi d’établir des compromis gagnant-gagnant ».

Du stress aux risques psychosociaux

Dans les années 2000, les Risques Psycho Sociaux ont fortement émergé. Stress, souffrance, angoisse : « on va agir sur les causes organisationnelles ; on est sur la prévention primaire, quelle que soit la catégorie professionnelle ».

Dans les années 2007 2008 : 35 salariés se sont suicidés chez France Telecom. Le climat est anxiogène, du harcèlement a lieu pour répondre aux objectifs de l’entreprise.

L’ANACT met en place des dispositifs de prévention. Philippe Douillet, travaille d’abord sur les TMS puis sur les RPS. « Derrière la dimension physique se posait déjà la question du sens du travail, mais il n’y avait pas de demande sociale »explique-t-il. C’est l’accord de l’union européenne qui a obligé les partenaires sociaux à travailler sur le sujet. Philippe Douillet a travaillé sur un suicide dans un laboratoire de recherche ; « Il fallait d’abord libérer la parole et décortiquer à partir d’une expression de souffrance et leur faire voir qu’il ne s’agissait pas d’un problème de caractère, mais d’un problème d’organisation : des facteurs de risque expliquent la situation ».

Nicolas Fraix, de l’ANACT explique : « le risque psycho social désigne une dimension du risque professionnel que le risque professionnel ne prenait pas en compte. Il nous fallait analyser le risque psycho social comme un risque professionnel avec des causes multifactorielles.

Il s’agissait de faire exprimer des situations où il y avait des tensions, dans lesquelles les régulations ne se faisaient plus ; quels étaient les facteurs de contraintes et est ce qu’il restait des facteurs de ressources…

De 2000 à 2020 : on a dû faire face à l’expansion des risques psycho-sociaux. Les parties patronales et mêmes syndicales souhaitaient sortir d’une approche risque. Pour gommer les sujets. « On est passé à la qualité de vie au travail, avec le risque d’effacer ce qui avait été fait ».

Adapter le travail aux hommes… et aux femmes !

L’ANACT a su mettre l’accent sur le sexisme et les spécificités des accidents du travail chez les femmes. Rappelons que la première loi sur l’égalité professionnelle date de 1983 et que la loi sur l’égalité salariale date de 2006.

L’ANACT a introduit le genre dans le recueil de ses données et a mené des observations pour mesurer l’impact du travail sur la santé des hommes et des femmes

Une publication de 2012 a mis à jour une baisse des accidents du travail chez les hommes dans des secteurs comme le BTP ou la logistique et une hausse pour les femmes dans ces secteurs. Les femmes sont entrées dans des secteurs non adaptés à leur constitution physique ; avec des données globales, il y a un risque d’invisibilisation des risques pris par les femmes.

Aussi, certains postes où étaient affectés les femmes étaient considérés comme moins pénibles. Et les femmes avaient accepté que les postes des hommes étaient plus pénibles. Or, souvent, les postes des hommes avaient bénéficié des évolutions du numérique et pas ceux des femmes. Les postes des femmes étaient finalement après modernisation, plus pénibles que ceux des hommes…

De plus, les femmes n’évoluaient pas dans leur parcours, et subissaient une exposition durable à la pénibilité ; elles se trouvaient en inaptitude à la fin de leur carrière contrairement aux hommes qui avaient évolué vers des postes moins pénibles.

La loi Rebsamen est venue a maillé les problèmes d’égalité professionnelle et de qualité de vie et conditions de travail.

Le réseau des ARACT a accompagné un grand nombre d’entreprises dans la mise en place de plans en faveur de l’égalité professionnelle. Un outil diagnostique l’égalité professionnelle à partir d’une quinzaine d’indicateurs déterminés sur 4 axes : mixité, travail, parcours et temps.

En 2022, un nouvel outil a vu le jour, avec 10 recommandations et un jeu de cartes sur le sexisme.

Rappelons qu’une femme sur 5 est confrontée au harcèlement sexuel dans sa vie professionnelle…

La Qualité de vie et les Conditions de Travail : une nouvelle voie pour dialoguer !

 

Il faut une approche intégrée, pour que chaque entreprise s’approprie ce qui est en jeu. Une démarche fondée sur la participation des salariés doit être encouragée.

On connaît aujourd’hui qu’un regard transverse sur les conditions de travail est nécessaire à l’épanouissement des individus au travail.

Le réseau ARACT accompagne les entreprises qui veulent modifier leur qualité de vie au travail. L’ANACT travaille sur des bases empiriques, apporte des compétences, enrichit ses solutions de nouveaux outils… La QVCT rassemble tout ce qui concerne l’organisation du travail. L’agence échange avec le CNRS et l’INRS ; expérimente sur le terrain.

Une centaine d’accords ont été signés ; quelles sont les conséquences ? les atouts et les limites ? L’ANACT n’a pas varié sur le fond, préconisant la co-conception d el’organisation du travail. « Ça doit partir de la réalité de l’entreprise. On peut transposer des démarches mais on ne peut pas plaquer des recettes » explique un cadre de l’ANACT. « Les salariés sont experts de leur travail. Ils ont la capacité de trouver collectivement des solutions aux aléas de la production, aux difficultés rencontrées. Une entreprise ne peut pas fonctionner sans dialogue ».

 

La QVCT a trop souvent été pensée de façon expérimentale. Les IRP ne savent pas toujours comment prendre en charge cette question. Entre salle de pause et cours de yoga… Il faut déjà poser l’état des lieux. Se poser la question de l’investissement en compétences. Il est essentiel de mieux porter les enjeux de performance et de santé…

 

Du 17 au 21 juin 2024, l’Anact organise la semaine pour la qualité de vie et des conditions de travail dans toute la France

Comme chaque année depuis plus de 20 ans, l’Anact organise dans toute la France, une semaine d’événements pour échanger sur les connaissances et pistes d’action en faveur de la qualité de vie et des conditions de travail.

Le thème 2024 : anticiper le travail de demain

Mutations écologiques, numériques, sociétales… Les entreprises se transforment pour faire face à des évolutions plus ou moins anticipées ou prévues. Mais quand il s’agit d’essayer d’anticiper les changements à mener, les questions de travail sont souvent vues comme une conséquence – rarement comme une donnée centrale. Or le travail et son organisation contribuent à soutenir la stratégie des entreprises et leur prise en compte conditionne la réussite des projets de transformation.

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