Depuis quelques années, le télétravail est plébiscité, tant par les salariés que par les dirigeants d’entreprise ; il connaît en France un développement considérable. Cette dynamique devrait se poursuivre, notamment grâce à une volonté gouvernementale.

L’enquête conduite en novembre dernier par l’IFOP, pour Malakoff Médéric, auprès d’un échantillon représentatif de salariés et de dirigeants d’entreprise du secteur privé d’au moins 10 salariés, démontre que la pratique du télétravail est largement répandue. Toutefois, cela se passe majoritairement de manière non contractualisée, ce qui présente des risques et un enjeu majeur pour les salariés et les entreprises. En effet, le télétravail contractualisé ne concerne que 6 % des salariés du secteur privé, alors que 19 % travaillent à distance de façon informelle.

Qu’est-ce que le télétravail ?

Le télétravail constitue un moyen pour les entreprises de moderniser l’organisation du travail et d’améliorer la qualité de vie au travail. Autrement dit, le télétravail serait gage, pour le salarié, d’une plus grande autonomie et d’une meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale.

Le télétravail désigne « toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication » (C. trav., art. L. 1222-9).

Plusieurs critères doivent donc être réunis pour caractériser le télétravail et être soumis aux dispositions des articles L. 1222-9 et suivants du code du travail :

• le télétravail doit utiliser les TIC (technologies de l’information et de la communication). Ce critère exclut donc les salariés qui n’effectuent que des tâches manuelles à leur domicile (travailleurs à domicile) ;

• le télétravail s’effectue en dehors des locaux de l’entreprise. Cela vise le télétravail au domicile du salarié (domicile principal et/ou résidence secondaire), mais aussi dans des espaces collectifs situés en dehors de l’entreprise ;

• le travail effectué en dehors de l’entreprise aurait pu s’effectuer à l’intérieur de l’entreprise. Travailler à l’extérieur des locaux de l’entreprise ne suffit donc pas en soi à conférer à un salarié la qualité de télétravailleur.

La définition est assez large pour englober des formes et des lieux de travail différents et recouvrir en pratique de multiples situations :

• télétravail sédentaire : le salarié travaille exclusivement à son domicile, en utilisant un matériel mis à sa disposition par l’employeur, ou dans un centre de proximité ;

• télétravail alterné ou pendulaire : le salarié alterne des périodes de travail à son domicile et sur son lieu de travail ;

• télétravail nomade : le salarié conserve un bureau sur le lieu de travail, mais il a recours aux technologies de l’information et aux outils de travail mobiles pour pouvoir travailler depuis n’importe quel lieu.

TéléTravail

L’entreprise peut recourir au télétravail manière occasionnelle

La nouvelle règlementation, soucieuse de s’adapter à la pratique des entreprises, le permet désormais contrairement au télétravail, avant les ordonnances Travail.

Dorénavant, à côté du télétravail dit ‘régulier’, parce que programmé à l’avance sur un nombre de jours fixe et sur une période de référence donnée, il existe un télétravail occasionnel sur lequel dirigeants et salariés peuvent se mettre d’accord dans des cas spécifiques. Ainsi, le code du travail vise expressément les épisodes de pollution (c. trav. art. L. 1222-9, II, 1°).

Cela étant, rien n’interdit de viser, à travers le télétravail occasionnel, des situations que l’on rencontre communément dans la vie des entreprises :

• situations individuelles spécifiques, en particulier les ‘personnes en situation de handicap’ et ‘l’état de grossesse’ pour lesquelles l’aménagement du poste de travail peut prendre la forme d’une solution de télétravail afin de favoriser le maintien dans l’emploi ;

• des difficultés de transport liées aux grèves ;

• des situations personnelles exceptionnelles et temporaires (problème de garde d’enfant, conduite de travaux à domicile, etc.).Teletravail3

Qui peut bénéficier du télétravail ?

Les dispositions légales ne restreignent pas le périmètre des salariés pouvant effectuer du télétravail. En pratique, cette forme de travail n’est toutefois pas adaptée à tous les salariés. Une analyse du poste, de l’autonomie du salarié, des modalités d’échanges au sein des équipes permet d’envisager la faisabilité de la mise en oeuvre du télétravail. La protection de la confidentialité des données traitées peut également amener à devoir écarter la possibilité pour le salarié de travailler depuis son domicile.

Certaines catégories de salariés peuvent être exclues du télétravail :

les salariés ne disposant pas d’une autonomie suffisante, ceux n’ayant pas suffisamment d’ancienneté dans l’entreprise, les salariés en période d’essai, ceux en situation d’astreinte à domicile, les stagiaires et les apprentis, etc.

Comment mettre en place le télétravail ?

Le télétravail peut être mis en place dans le cadre d’un accord collectif, ou à défaut, dans le cadre d’une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE ou du CE ou, en l’absence d’accord collectif ou de charte, par un accord entre le salarié et l’employeur, formalisé par tout moyen (C. trav., art. L. 1222-9, I).

La mise en place du télétravail n’a plus à être formalisée dans le contrat de travail ou par un avenant contractuel, comme c’était le cas avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 22 septembre 2017.

La loi de ratification du 29 mars 2018 a supprimé l’exigence d’un accord collectif ou d’une charte pour mettre en place le télétravail dans l’entreprise.

Depuis le 30 mars 2018, il est donc possible de recourir au télétravail, soit en appliquant :

• un accord collectif qui aura été négocié au préalable. Il peut s’agir d’un accord collectif de branche, d’entreprise, d’établissement, de groupe ;

• ou, à défaut, une charte élaborée par l’employeur après avis du comité social et économique, s’il existe. En raison des termes « à défaut », la mise en place du télétravail par une charte ne peut se faire que, dans l’hypothèse où il y a des délégués syndicaux dans l’entreprise, si une négociation sur le télétravail a été engagée, mais qu’elle a échoué. En l’absence de délégué syndical, l’employeur peut directement opter pour la rédaction d’une charte ; il n’est pas tenu d’utiliser les techniques subsidiaires de négociation (négociation avec un salarié mandaté, avec le CSE…) ;

• en l’absence d’accord collectif ou de charte, un accord écrit entre chaque salarié concerné et l’employeur. Le télétravail peut être mis en place sur la base d’un accord individuel y compris si l’employeur n’a pas ouvert les négociations d’un accord collectif.

Nécessité d’un accord entre l’employeur et le salarié

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Le télétravail revêt un caractère volontaire, pour le salarié et pour l’employeur, auquel il ne peut être dérogé. Cela signifie que le télétravail peut faire partie des conditions d’embauche du salarié ou être mis en place par la suite, sur la base du volontariat. Les modalités d’acceptation par le salarié du passage en télétravail sont fixées par la charte ou l’avenant C. trav., art. L. 1222-9.

Possibilité d’un refus motivé par l’employeur

Lorsque le salarié demande à passer en télétravail, en application de l’accord collectif ou de la charte sur le télétravail applicable dans l’entreprise, l’employeur qui refuse d’accorder le bénéfice du télétravail à ce salarié doit motiver sa réponse (C. trav., art. L. 1222-9).

Les motifs pouvant être invoqués par l’employeur doivent être objectifs. A défaut, le refus pourrait être considéré comme discriminatoire et portant atteinte au principe d’égalité de traitement.

Il peut s’agir des motifs énumérés dans l’accord collectif ou la charte ou d’un motif différent, tels que :

• condition d’éligibilité non remplie ; – impossibilité technique (logement non adapté au télétravail) ;

• coûts techniques et informatiques liés au transfert du poste de travail ;

• impératifs de sécurité et de confidentialité des informations (secteur de la Défense notamment) ;

• risque de désorganisation au sein de l’équipe ;

• autonomie insuffisante du salarié. Certains accords collectifs prévoient qu’en cas de litige, le salarié peut contester la décision de refus auprès d’une commission de suivi.

Certains accords collectifs prévoient qu’en cas de litige, le salarié peut contester la décision de refus auprès d’une commission de suivi.

Interdiction d’imposer le télétravail

L’occupation, à la demande de l’employeur, du domicile du salarié à des fins professionnelles constitue une immixtion dans la vie privée de celui-ci et n’entre pas dans l’économie générale du contrat de travail.

Le salarié n’est donc tenu, ni d’accepter de travailler à son domicile, ni d’y installer ses dossiers et ses instruments de travail (Cass. soc., 7 avr. 2010, n° 08-44.865, n° 819 FS – P + B Cass. soc., 11 juill. 2012, n° 10-28.847).

Le refus d’un salarié d’accepter un poste de télétravailleur n’est pas en soi un motif de rupture de son contrat de travail (C. trav., art. L. 1222-9).

En effet, le salarié n’est tenu ni d’accepter de travailler à son domicile, ni d’y installer ses dossiers et ses instruments de travail (Cass. soc., 2 oct. 2001, n° 99-42.727, n° 4163 FS – P + B + I).

Attention : le télétravail n’est pas une mesure de faveur, ni un outil de récompense. La performance du salarié peut être un critère d’éligibilité, mais il ne doit pas être discriminant

Quelles mentions doit contenir l’accord collectif ou la charte mettant en place le télétravail ?

Si le télétravail est mis en place par accord collectif ou par une charte, ces derniers doivent comporter (C. trav., art. L. 1222-9) :

• les conditions de passage en télétravail,

• les conditions d’exécution du télétravail : le lieu du télétravail, le nombre de jours télétravaillés , les équipements de travail fournis, la prise en charge des coûts liés au télétravail… ;

• les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail. Il s’agit de la clause d’adaptation et de réversibilité prévue par l’Ani du 19 juillet 2005 ;

• les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en oeuvre du télétravail ;

• les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail. Notons qu’il appartient à l’employeur de veiller au respect de la règlementation sur le temps de travail, notamment en s’assurant de la fiabilité du système de décompte des heures supplémentaires, même si le salarié gère librement les horaires de travail (Arr. 30 mai 2006 : JO, 9 juin),

• la détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié en télétravail. C’est une mention qui était aussi prévue par l’Ani du 19 juillet 2005.

Delphine VIVAT Manager

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